[Review] Alphonse Président : une série bien franchouillarde

Alphonse Président, c’est la nouvelle série OCS Signature et c’est, comme son titre vous le laisse déjà deviner, une production 100% française. Comédie en dix épisodes d’environ 26 minutes, cette série raconte comment, suite à la disparition du Président français, Alphonse Dumoulin, professeur d’Histoire à la retraite fraîchement nommé Président du Sénat, se retrouve Président français… par intérim.

La situation prête à sourire, mais quand on nous vend la série comme « complètement décalée à l’humour… so frenchy », il y a de quoi être véritablement curieux. C’est encore renforcé par le slogan promotionnel qui laisse songeur : « Rien ne va plus au pays des Lumières, des droits de l’Homme et de la blanquette de veau. » Difficile de résumer mieux que ça ces dix épisodes… déroutants !

Une première impression mitigée

Il faut bien l’admettre, Alphonse Président se présente dès sa première scène comme un OVNI français. Elle n’a pas de quoi révolutionner la comédie française, mais elle s’attache au contraire à défendre un humour à l’ancienne disparu et à la française qui déroute, c’est le mot, complètement dès ses premières minutes. Lors de la première scène, nous assistons tout de même à un débat du Sénat sur… des croissants. Nous sommes loin de l’intrigue politique annoncée et pour cause : Alphonse n’est même pas encore Président du Sénat. Le premier épisode a beaucoup à mettre en place car toute la situation vendue dans le résumé de la série doit progressivement s’écrire.

C’est dommage : malgré la bonne volonté générale qui se sent, le premier épisode peine à convaincre. Du côté de la réalisation, on nous balance des images d’archives de qualité moyenne parmi des plans à la photographie soignée, tout un tas de plan de profil et de longs silences qui font que l’on a du mal à percevoir l’humour dans le rythme lent de l’épisode. En plus, certains acteurs – qu’on ne nommera pas car ils progressent heureusement rapidement par la suite – semblent avoir du mal à cerner leurs personnages. En toute logique, c’est aussi le cas pour le téléspectateur qui se demande parfois ce qu’il est en train de regarder, peu aidé par des décors qui oscillent entre une richesse réaliste pour l’Élysée ou Matignon et une pauvreté incompréhensible pour d’autres décors.

On sent malgré tout un bon potentiel qui donne envie de continuer, surtout quand l’on apprend la France en faillite de 200 milliards, mais ça met du temps dans ce premier épisode.

Des personnages saugrenus et burlesques

Loin d’être le personnage central de l’intrigue comme je l’imaginais, Alphonse Dumoulin (Michel Vuillermoz, de la Comédie française) est, certes, Président, mais il est aussi totalement déconnecté de la réalité. L’avantage ? Cela permet de transmettre beaucoup d’humour et de brosser le personnage assez vite. Totalement cliché à certains égards, Alphonse est assez antipathique et s’avère avoir une vision passée de la France, entrant directement en conflit avec celle de la Première Ministre, Amandine Barzati (Nabiha Akkari).

Oui, oui, « Première », n’en déplaise à l’Académie française et Alphonse. Si la série s’appelle Alphonse, elle repose en fait principalement sur la confrontation entre le Président par Intérim et la Première Ministre qui apporte son lot de situations cocasses. Amandine est loin d’être parfaite elle aussi : jeune, elle peine à trouver sa place et son autorité, elle est bien souvent débordée par les événements. Elle a son caractère bien à elle et sa trouille viscérale de la chancelière allemande, un running gag qui finit par être sympathique.

Elle est assistée par Julien (Bruno Gouery), tout aussi débordé qu’elle et trouillard à ses heures quand il s’agit de contredire sa boss. Il est une jolie révélation de la série, apportant bien souvent l’humour promis dans ses scènes.

Seulement, la confrontation entre Alphonse et Amandine pour redresser et sauver le pays n’est que la partie immergée de l’iceberg. En sous-terrain, Philippe Danglard (Jean-Michel Lahmi), ministre de l’Intérieur, est en quête de pouvoir et fait tout pour le prendre ! Il ne recule devant aucun crime, de l’espionnage à l’enlèvement, grâce à Bison (Michaël Vander-Meiren), son homme de main qui fait tout le sale boulot mais n’a pas inventé l’eau chaude des plats qu’il mijote tout au long de la saison.

Pour compléter cette galerie de personnages déjà haute en couleur, les scénaristes ont aussi imaginé un garde du corps pour le président : Jeff (Alexandre Blazy), un Corse qui ne quitte pas Alphonse d’une semelle après avoir perdu le président Sorac. Lui aussi met du temps à se dévoiler, mais il est à surveiller, car il finit par apporter un bon humour.

Vous avez dit prof d’Histoire ?

Le Président Dumoulin est donc présenté comme un professeur d’histoire dans le synopsis, mais cet aspect de sa personnalité est surtout une indication sur le type d’humour à attendre de la série. En effet, avec Alphonse, c’est à une pluie de citations de grands hommes français et de dates qu’il faut se préparer. Ce ton est volontairement adopté pour faire de Dumoulin un bon français de la vieille école, une sorte de mélange entre « Cyrano, Astérix et le Général de Gaulle ». Vaste programme, comme dirait l’autre.

Il faut s’y faire, la série parlera plus aux passionnés d’Histoire et de Culture générale qu’à ceux qui attendent une série « temps de cerveau disponible ». Une grosse partie de l’humour repose sur des jeux de mots et des comiques de situation très théâtraux, avec des références parfois difficiles à débusquer. Cependant, c’est d’autant plus satisfaisant de les repérer par moment, surtout qu’il existe un décalage humoristique entre les personnages eux-mêmes, certains manipulant les références littéraires et historiques sans problème quand d’autres ont déjà bien du mal à aligner quelques mots cohérents.

Par conséquent, Dumoulin est tellement vieille France qu’il sera au choix votre personnage préféré si vous accrochez à cet humour ou votre personnage détesté. Il faut reconnaître qu’il est souvent insupportable, avec sa pipe, son machisme latent et surtout, surtout, ses sorties qui frôlent bien souvent le racisme. Tous nos voisins européens en prennent pour leur grade au cours des dix épisodes car la série s’amuse des clichés : de l’austérité allemande à l’appât du gain luxembourgeois, en passant par des anglais assoiffés de pouvoir et des Corses… ma foi, Corse. Cet aspect de la série est déroutant, mais comme la France est elle aussi caricaturée, le tout est principalement bon enfant. En plus, Amandine Barzati veille au grain pour contrôler le Président par intérim. Du moins, elle essaye.

Une série franchouillarde

En bref, il faut retenir de la série qu’elle est franchement franchouillarde : tous les clichés vieille France y passent, quitte à user de slogans ou de références passées pour être sûr de taper sur tout le monde et même Google, sympathique renommé Goolag (si, si). En bonne française, la série est aussi littéraire qu’historique, théâtrale que politique, s’appuyant sur un passé glorieux oublié aujourd’hui et des jeux de mots bien sentis pour mettre en place un complot politique peu crédible, mais qui ne cherche pas à l’être. Le message est clair, la série veut faire rire et ne s’attardera que peu sur les vraies conséquences politiques de son intrigue, se contentant de quelques extraits journalistiques pour nous montrer la situation du pays en-dehors du haut cercle qu’il nous est donné à voir. Il faut se rendre à l’évidence, elle ne fera pas rire tout le monde et s’adresse à un public qu’elle espère un brin franchouillard et plein d’autodérision.

Plus la saison avance, plus il est facile de se prendre au jeu et à l’humour d’une série qui se dévoile sérieuse sous des airs de comédie, drôle sous des airs sérieux ; bref, une série qui détonne, ne nous laisse pas deviner sur quel pied danser, provoque quelques fous rires une fois dans l’ambiance et pour laquelle on souhaite déjà une saison 2.

Diffusion le 23 novembre à 20h40 sur OCS Max et en intégrale sur OCS Go.

Article de Shipou que vous pouvez retrouver sur justonemoreep.wordpress.com

1 Comment

  • Personnellement, j’ai beaucoup ail=mé cette série, et j’attends la saison 2

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